Carte blanche – Une centaine de professionnels de l’enfance pour la levée du port du masque à l’école primaire

De nombreux psychologues s’inquiètent et co-signent cet article contre le port du masque chez les enfants. En 24h, le texte a été signé en urgence par une centaine de professionnels de l’enfance.
Le 3 décembre 2021, à la suite d’un CODECO, nous apprenons avec stupeur les nouvelles mesures qui ciblent principalement les enfants: le port du masque dès 6 ans, le retour à l’enseignement hybride en secondaire, la fermeture des classes à partir de deux cas positifs et la fermeture des écoles maternelles et primaires dès le 20 décembre.
Nous comprenons que cette décision a été prise afin de freiner la propagation du COVID-19 et d’éviter la saturation des hôpitaux. L’école semblerait être un des lieux où le virus circule le plus. Mais de nombreuses incohérences sautent aux yeux. Les enfants testés positifs sont souvent asymptomatiques ou porteurs de symptômes légers. Ce ne sont pas eux qui engorgent les services hospitaliers. Leur rôle en tant que vecteur de transmission n’est pas établi clairement par la communauté scientifique.
La nouvelle consigne de port du masque chez les enfants dès six ans nous interpelle particulièrement en tant que psychologues.
Cette décision, prise par nos politiques, est loin de faire l'unanimité́ parmi les experts scientifiques et est décriée par de nombreux médecins, pédiatres, logopèdes et psychologues. Les enfants ne peuvent gérer le port du masque. Leur maturité praxique et organisationnelle ne leur permet pas de le manipuler et le porter adéquatement ni même de respecter les mesures d’hygiènes requises à l’efficacité de celui-ci. Comme l’a justement stipulé Sciensano, le port du masque buccal dans les écoles primaires et maternelles n’est pas recommandé, car son utilisation correcte est impossible.
Kaarle Joonas Parikka, docteur en microbiologie, spécialisé dans la dynamique virale nous rappelle que : “L'utilité́ des masques comme moyen de prévention de la transmission de SARS-CoV-2 est controversée dans le milieu scientifique.(…), les enfants ne souffrent pas d'hospitalisation et ne décèdent pas du COVID-19. De fait, les enfants souffriront des effets néfastes liés au port du masque (incluant des effets psychologiques, éducationnels, physiques, etc.) sans pour autant profiter d'une utilité contestée du masque dans la transmission du virus.”
En tant que psychologues et professionnels de l’enfance, nous sommes confrontés à l’impact psychologique des mesures sanitaires depuis bientôt deux ans. Si nous avons associé la deuxième vague à la souffrance psychique des adolescents, nous voyons déjà cette vague-ci impacter les plus jeunes enfants. Nous voulons alerter l’opinion publique sur les dangers que représente la prolongation de ces mesures, en particulier le port du masque chez les enfants dès 6 ans, et plaidons pour la suppression de ces mesures en janvier 2022.
Lorsque la moitié du visage est masquée, l’enfant subit une perte massive d’informations non verbales – essentielles dans la communication. L’enseignant qui fait face aux élèves masqués a des difficultés à percevoir clairement les signes de décrochage, d’incompréhension, d’angoisse ou de tristesse. Dans les autres pays ayant imposé le port du masque dans l’enseignement primaire, comme la France et certaines régions en Allemagne, l’impact psychologique s’est fait immédiatement ressentir sur le terrain. En France, les services de psychologie pour enfants ont été saturés en moins de deux mois. Depuis deux semaines en Belgique, les enseignants et nous-mêmes constatons énormément de réactions préoccupantes chez les enfants : difficultés à respirer, maux de tête et de ventre, expressions de ras-le bol, d’irritabilité croissante et de tristesse, réticence voir refus d’aller à l’école.
Pour certains enfants, plus sensibles, plus timides, ou ayant des difficultés de langage, prendre la parole est déjà compliqué. S’exprimer avec la bouche entravée peut devenir une mission impossible pour eux, traversant toute une gamme d’émotions négatives telles que : peur du jugement, frustration, colère, repli sur soi. Avec le risque qu’ils choisissent de garder le silence. L'apprentissage des habiletés sociales et les difficultés de communication de ces enfants ne pourront alors que s’aggraver.
Il est clair également que le masque accentue le caractère anxiogène du climat d’instabilité dans lequel les enfants vivent déjà au quotidien depuis de nombreux mois. Les fermetures successives des classes et écoles, les mesures de distanciation bannissant les câlins si utiles au réconfort, le stress au sein de la famille, sont autant de facteurs générateurs d’une “pandémie d’insécurité” au niveau des enfants. Le masque les sur-responsabilise et les désigne officiellement comme vecteurs de la maladie, les instituant en danger les uns pour les autres, voire les investissant de la mission de rappeler à leurs camarades de bien le porter, ou de signaler aux professeurs qu’un élève l’a enlevé.
Grandir dans un climat anxiogène expose les enfants à un état de stress chronique, avec un impact traumatique majeur. Plus un enfant est exposé à une situation stressante, plus l’impact traumatique risque d’être important. En tant que psychologues, nous pouvons difficilement réduire la charge traumatique d’un individu tant que celui-ci reste exposé à la situation stressante.
Nous demandons urgemment aux autorités de lever la mesure de l’obligation de port du masque pour les enfants de l’école primaire, sans que cette levée ne s’assortisse de mesures compensatoires telles que les fermetures d’école ou tout autre conséquence les concernant.
Nous exhortons nos autorités à sortir d’une logique d’urgence et à entrer dans une réflexion sur le long terme, prenant en compte tous les acteurs de la santé, incluant les professionnels de la santé mentale.
Les enfants ont besoin de se sentir en sécurité́, et ont d’abord besoin de joie, d’affection, de rires et de rêves pour bien grandir et se projeter dans l’avenir. Il ne leur appartient pas de porter les craintes des adultes. L’école se doit d’être un lieu sécure pour permettre la pleine disponibilité aux apprentissages. Elle se doit également d’être un lieu de socialisation, qui transmet le plaisir d’apprendre, la joie du vivre ensemble. Sans cela nous risquons de voir augmenter encore les troubles anxieux et dépressifs chez des enfants qui ne présentaient pas de difficultés particulières jusque-là̀. Cela risque de créer un autre problème de santé publique qui, à son tour, viendrait engorger les services de pédopsychiatrie des hôpitaux.
Illustration de Carole Eclisse
Signataires: Aurore Arnould, psychologue, psychothérapeute ; Anne Schaub, assistante en psychologie et psychothérapeute ; Julie Coutellier, psychologue, thérapeute du développement ; Emilie Lucas, assistante en psychologie ; Harmony Dussart, psychologue et psychothérapeute ; Diane Drory, psychologue et psychothérapeute ; Vanessa Greindl, psychologue et psychanalyste enfants ; Marie Cortesi, neuropsychologue ; Julie Jacqmin, psychologue ; Julita Bobrowska, psychologue, psychothérapeute ; Carolina Balut, psychologue et psychothérapeute ; Doris Van Cleemput, psychologue et psychothérapeute ; Olivia De Vylder, neuropsychologue ; Caroline Foucart, psychologue ; Stefania Giagnorio, psychologue et psychothérapeute ; Danielle Perez, psychologue ; Lia Salama, psychologue et psychothérapeute ; Laurence Dermine, psychologue et psychothérapeute ; Sigiri Dophny, psychologue ; Christine Henderickx, psychologue ; Bianca Pereira, psychologue ; Virginie Duchêne, psychologue ; Laura Chiapetta, psychologue ; Céline Rans, psychologue ; Audrey Brouillard, psychologue ; Mandy Mahr, assistante en psychologie et psychomotricienne ; Anouk Binet, psychologue ; Claire Renoy, psychologue ; Pauline Fallon, psychologue et psychothérapeute ; Hélène Spehl, psychologue ; Amandine Dujacquier, psychologue et psychothérapeute ; Stéphanie Rogat, psychologue ; Amandine Monsel, psychologue ; Melissa Prajs, neuropsychologue ; Joëlle Rabinowitch, psychologue et psychothérapeute ; Lia Van Belleghem, psychologue et psychothérapeute ; Eleni Grammaticos, neurolinguiste et thérapeute du développement ; Chloé Godi, psychologue ; Joanna Englert, assistante en psychologie ; Elise Delens, psychologue et thérapeute familiale ; Nastasia Blaise, psychologue ; Alice Wolff, psychologue et psyhothérapeute ; Valentine Degreef, psychologue ; Vinciane Sury, psychologue ; Elise Delens, psychologue, Clémentine Ronse, psychologue ; Séphora Thomas, psychanalyste ; Farah Merzguioui, psychologue ; Sandrine Desmurger, psychologue ; Marie Puttemans, psychologue ; Alexia Boucau, psychologue ; Alicia Desmedt, psychologue ; Elisabeth Lemetais, psychologue ; Coralie De Rop, psychologue ; Noelle Fabri, psychologue ; Aline Mottet, assistante en psychologie ; Michèle Desonai, psychologue ; Anouchka De Beys, psychologue ; Sophie Liebermann, psychothérapeute Docteur Alexandra Wauthier, pédopsychiatre ; Docteur Marie Annet, pédopsychiatre ; Docteur Juliette Bourguignon, pédopsychiatre ; Docteur Anna Papazova, pédopsychiatre ; Docteur Brigitte Alexandre, pédopsychiatre ; Docteur Caroline De Vreese, médecin scolaire ; Françoise Adam, Docteur en psychologie ; Kaarle Joonas Parikka, docteur en microbiologie ; Christine Achen, psychomotricienne ; Wendy Clark, psychomotricienne ; Marie Praile, psychomotricienne ; Marie-Ange Hargot-Pottier, psychomotricienne ; Sophie Olivier, psychomotricienne ; Anaïs Huchard, enseignante ; Amandine Lucas, enseignante ; Caroline Grenade, enseignante ; Natacha Rosenbaum, enseignante ; Laura Ferreira Da Silva, enseignante ; Emilie Mainguet, enseignante ; Violette Leclercq, enseignante ; Céline Taubennest, enseignante, Christelle Cordonnier, enseignante, Françoise Nyst, enseignante ; Catherine Dirckx, enseignante, Anaïs Delos, enseignante ; Hortense Dayez, animatrice dans une école de devoirs Caroline Grimberghs, professeur en secondaires ; Dominique Carpentier, directrice d’école ; Christine Pitance, directrice d’école ; David Gilot, fondatrice d’école ; Anne-Benedicte Bailleux, fondatrice d’école ; Louveaux Grégoire, directeur d’école ; Raphaël Hector, coordinateur dans l’aide à la jeunesse ; Pauline Lucas, enseignante Caroline Lambotte, enseignante ; Naïma Jakrir, travailleuse psycho-sociale Nil Görkem Yogurtçu, travailleuse psychosociale et animatrice scolaire ; Julia Leboeuf, travailleuse sociale ; Pauline Dujardin, travailleuse sociale ; Marie Daspremont, travailleuse sociale ; Anne Spehl, psychologue et psychothérapeute Emilie Ugeux, psychologue; Samuelle Dupuis, Psychologue et thérapeute du développement; Stefania Pereira, psychologue; Tatiana Capiau, psychologue; Françoise Nijst, enseignante; Céline Clément, Logopède; Laure-Marie Schmitz, éducatrice spécialisée