Secrets de famille
Secrets d’alcôve, secrets gardés, secrets cachés, jardin secret, toutes ces formes de secrets traversant chacune de nos vies, que faut-il en penser ? Sont-ils le résultat d’un sentiment de honte ? de culpabilité ? Ou simplement garantissent-ils notre indispensable besoin d’intimité ? Y a-t-il des bons secrets et d’autres qui seraient néfastes ?
De l’utilité des secrets
Le secret a un effet structurant et fondamental pour la vie psychique de tout un chacun car tous, nous avons droit à notre jardin secret, droit d'avoir des pensées personnelles et de penser que celles-ci n’ont pas à être sues par d’autres si nous ne le souhaitons pas ! Le secret supporte et confirme les sentiments d’identité propre, de valeur ainsi que le plaisir de penser seul. Le droit au secret permet de constituer une délimitation claire entre les autres et soi, entre notre vie publique et notre vie privée. L’acte de taire ou de cacher se situe dans un cadre relationnel, et, dans ce cadre, il sert à marquer la différence entre ceux à qui le secret sera dit et ceux à qui il sera cacher.
« Le secret est fondateur à la fois de la vie psychique personnelle et du lien avec les autres » nous dit S. Tisseron. En effet, construire et partager un secret est une manière d’établir et de maintenir un lien entre les détenteurs du secret ; ce lien différentie, de la foule anonyme, ceux qui le partagent.
Ainsi, par exemple, les couples en restant discrets sur la façon dont se déroulent leurs ébats amoureux ou autres connivences, utilisent une forme de protection de soi à l’égard de leurs enfants. Ceux-ci, tout en étant intrigués par les secrets d’alcôve, se voient soulagés par ces secrets car ils sont la preuve que le plaisir des parents n'est donc pas tributaire de la complicité de l'enfant ! De même, l’enfant a droit à une vie privée, à l’école par exemple, et les parents n’ont pas à s’adjuger le droit de tout savoir ! Le secret a donc le pouvoir de délimiter les générations et d’individualiser
Mais attention à côté du secret dont le rôle essentiel est de protéger notre intégrité, il existe des secrets au rôle dévastateur.
Le secret destructeur
Lorsqu’il est objet de chantage ou blessant ou encore mal codé et transmis de façon détournée, le secret peut bien lourd à porter par le détenteur du secret et par ses descendants.
Le secret dévastateur sera celui qui veillera à garder caché, à refuser de mettre dues mots sur des évènements qui ont fait souffrir, entre autre avec l’espoir qu’ainsi ces vécus ne feront plus souffrir. En plus, souvent, le besoin de garder sous silence est motivé par la peur de paraître indigne au regard de l’autre. Sans parler du fait que le désir de cacher aux autres une partie pénible de son existence est soutenu par le désir de se la cacher à soi-même…
Ce n’est pas pour rien que nombre de femmes ayant subi des attouchements incestueux les ont complètement « oubliés ». Un acte violent ou excitant et très interdit auquel ont participé deux ou plusieurs personnes crée un lien très fort entre eux. Le secret cherche à nier ce lien. Le geste néfaste, porteur de honte doit resté enfermé, enclavé dans un coin du psychisme hors de toute connexion avec d’autres images de la conscience, sous peine d’envahir toute la personnalité. Parfois, l’équilibre sinon la vie sont à ce prix.
Une dame souhaitant dialoguer avec sa mère au sujet de souffrances d’enfance difficile à situer, s’entendit dire : « Moi, j’ai eu des parents qui m’ont fait souffrir et j’en ai tiré mon parti…Je ne veux plus revenir là dessus » D’autres encore disent à propos d’un sujet douloureux : « Je ne veux pas parler de cela, j'ai tiré un trait là dessous »
Autre exemple : Pour des raisons personnelles, un couple décide de rompre définitivement avec la mère de madame, de la gommer de l’histoire familiale. Leurs enfants naissent et grandissent sans connaître la grand-mère et sans que jamais elle ne soit nommée. A leur tour ils se marient et jamais un mot sur cette grand-mère. Une règle s’est imposée au fil des ans : ne pas parler de cette grand-mère. A la nouvelle génération : nouvelle règle : on ne parle pas des relations entre parents et enfants…
Dans pareils cas, ces règles seront transmises implicitement dans une série de non-dits autour du secret, sorte de rituels renforçant le mythe familial. Ainsi les règles familiales sont là pour encadrer le secret qui, au fil des générations, subira des transformations qui seront la source de nouveaux secrets.
La règle du silence
Celui qui décide et détient le secret mettra alors au point des règles destinées à le contrôler et le maintenir. Parmi ces règles une série de silences concernant certains faits s’impose créant une menace qui pèse sur celui qui crée, détient et garde le secret.
Cette ambiance trouble va provoquer une tendance chez l'enfant et plus tard chez l'adolescent à cacher ses propres erreurs, ses propres questions. Ainsi la communication s'en trouve atteinte, personne ne parlant plus de ce qu'il pense et ressent, chacun restant seul dans l'effort de montrer une image idéale, parfaite de lui-même.
Dans certaines familles un secret est camouflé derrière l’impression donnée qu’il ne se passe rien, l’ambiance est monocorde. Les parents sont identiques à eux-mêmes mais sans altérité, n’ayant rien transmis de leur failles, de leur mémoire.
« Tout le monde joue un jeu où l’on cache tout à tout le monde. Tout le monde ment. Dans cette famille ON NE VEUT RIEN VOIR. Les parents se ferment à toute écoute et la seule chose qu’ils prônent est de faire comme ont fait leurs parents, par exemple de rester très pratiquant en ne ratant la messe à aucun prix… » nous confie Jeanne.
D’une génération à l’autre, le secret se transmet !
Aussi étonnant que cela puisse paraître, moins quelque chose est parlé, plus cela se transmet ! Le secret est le meilleur moyen de transmettre une information de génération en génération et cela grâce aux règles mises en place pour empêcher sa révélation ! Ne pas parler de la grand-mère est une façon de la mettre en évidence ! Ainsi ce que l’on veut cacher est montré au grand jour mais sans qu’il y ait les clés permettant de décoder le message ! Rien ne vient expliciter pourquoi il est interdit de parler ou de poser quelque question embarrassante au sujet de cette grand-mère, et des relations parents enfants…
L’existence d’un secret, les descendants le pressentent à de nombreuses occasions car un secret ne se communique pas uniquement avec des mots. Il traverse le temps au travers d’une manière de parler, de plaisanter, de se comporter ou encore par un trou de mémoire, une organisation de vie, un désir bizarre, un livre favori. Le secret est donc à la fois caché et révélé.
Les exemples sont nombreux qui montrent comme nous pouvons être, à notre insu, tracassés par un secret personnel enclavé dans notre mémoire inconsciente. De même, nous pouvons être inconsciemment habités par les secrets d’un autre ; nombreux sont les auteurs qui ont évoqué le concept de fantôme qui parasite le fond de l’inconscient d’un individu, secret inavoué et inavouable d’un autre, parent ou proche. Pensons à Œdipe qui paya cher le tribu des fautes inavouées commises par son père ; et cela malgré toutes les précautions prises et secrets mis en place par ce dernier pour échapper à la malédiction…
Il n’est pas rare d’avoir à remonter à deux générations antérieures pour élucider la cause de souffrances ou de perturbations psychiques d’une personne, car il arrive que suite à la transmission d’un secret, au fil des générations, un membre de la famille paye le tribu et croule sous le poids du secret et des sentiments qu’il transporte. Soit, il sera sacrifié au mythe familial en portant seul honte et culpabilité et libérant ainsi la famille du poids du secret, soit la mémoire sera questionnée et le secret révélé.
Les secrets de famille
En parlant de « secrets de famille » il nous vient tout de suite à l’esprit : l’existence d’un enfant issu d’un inceste ou de père inconnu, des actes commis à l’encontre de la loi, des trahisons pendant la guerre, des drames d’héritage ou un membre de la famille qui aurait mis tous les autres sur la paille.
Le vrai secret de famille est quelque chose que l’on sait ou que l’on pressent, mais à propos duquel il existe un contenu implicite de ne pas en dévoiler le contenu, afin de ne rien changer dans le mode de vie. Il a un rôle important dans le maintien de la cohésion du système familial. Ainsi, nous dira A. Seghers : « Avec le secret on transmet le non-savoir, l’interdit du savoir et le savoir du non-savoir, c’est à dire on transmet le secret, l’interdit de chercher à connaître le secret et la connaissance de ce qu’il y a un secret ».
Un tel secret est toujours lourd de sens, d’un sens dont ceux qui le détiennent craignent que sa divulgation représente un risque pour la famille et pour ses membres.
Parfois ce sont les descendants qui décident du secret, ainsi cette femme dont le frère avait disparu en Afrique sans laisser de traces, a-t-elle toujours caché, à son mari et à ses enfants, l’existence de ce frère qui aurait commis des actes peu glorieux. La présence d’un secret de famille implique toujours une blessure narcissique, une dévalorisation, une atteinte à l’image de soi et au mythe personnel, une atteinte à l’image de la famille.
Les nouveaux secrets
De nos jours, bien des personnes sont encore réticentes à accepter d’imaginer, que nous portons en nous au travers de la mémoire cellulaire l’histoire de notre famille et des individus dont nous sommes issus, et aussi l’histoire de notre conception.
Si la vérité quant à l’origine d’un enfant adopté est de moins en moins taboue, ce n'est pas encore le cas pour les enfants conçus par inséminations artificielle, par in vitro ou par donneur. Parler à un enfant des circonstances de sa conception, de sa venue dans la famille quand celle-ci n'est pas synonyme de plaisir mais plutôt de technologie, ne coule pas de soi. Et pourtant, aussi étonnant que cela puisse paraître, l’enfant « sait » sans savoir car dans la sensibilité de ses cellules tout est inscrit. En cas de fécondation in vitro, il n’est pas rare de voir un jeune enfant souffrir de l’élimination des œufs fécondés superflus. Cette souffrance est parfois doublée de culpabilité, l’enfant s’imaginant les avoir tués…En cas de conception par donneur, il se peut qu’un enfant s’approprie la blessure narcissique du parent stérile et manifeste des symptômes qui freinent son développement psychique. Dans ces cas, lever le voile du secret est un cadeau fait à l’enfant.
Si les morts par suicides sont moins cachées, il n’en est pas de même pour les malades morts du sida. Une série de faux prétextes sont annoncés pour expliciter cette mort, ceux-ci brouillent les pistes mais aussi le lien de confiance transmettent de l’inutile honte…
L’avancée de la technologie rend le secret quant aux enfants issus de relations extra conjugales, de plus en plus précaire. D’ailleurs, certaines études sur la génétiques ont dues être interrompues car elles révélaient trop souvent que le père n’était pas celui que l’on croyait ! Que de parlottes autour de la découverte de « Delphine » ou de la fille de Mitterand, comme s’il s’agissait de cas d’exception…
Force est de constater, aujourd’hui, qu’à un moment ou un autre l’individu a droit à la vérité car ce type de secret peut avoir des conséquences plus graves que l’on ne l’imagine. Cependant, ne nous illusionnons, révéler un secret n’entraîne pas d’emblée la suppression des troubles qu’il cause. L'enfant, l'adolescent ou l'adulte a appris à organiser sa personnalité, son rapport aux autres et au monde autour du secret, lorsque celui-ci est révélé il aura à déconstruire puis reconstruire une partie de sa vision du monde. Le travail psychique a effectuer sera donc à la fois conscient et inconscient.
Que faire avec les secrets ?
Le porteur d’un secret doit-il le garder, le relever, le transmettre ? Vous imaginez bien qu’il n’y a, à ce propos, aucune règle générale car trop éléments jouent dans un sens ou un autre. S’il faut être conscient des effets pathogènes de certains secrets ou de leurs effets destructeurs de liens, il ne faut pas jeter le bébé avec l’eau du bain ! Chacun de nous avons besoin de jardin secret, de silences, de choses non dites pour l’équilibre de notre développement psychique et pour l’élaboration d’une relation d’intimité.
Imaginez l’horreur d’un monde où chacun saurait tout de l’autre, impossible de construire un Moi qui ne serait qu’à moi !
D. DRORY
Le secret sous toutes ses formes !
Le secret est un non-dit qui est à taire. C’est une forme de tabou par rapport à une chose que l’on protège en ne la touchant pas, en ne la nommant pas, en veillant à la laisser indéfinie. Ne dit-on pas que trahir un secret est de l’ordre d’un sacrilège ? Il y a donc quelque chose de sacré dans le secret.
Quand le secret est montré
Il s’agit ici d’une information qui n’est pas dite mais dont on sait qu’elle ne l’est pas. Celui qui se tait sait ce qui est tu. Ainsi le petit enfant qui ne dévoile pas à sa mère le contenu du cadeau qu’elle recevra pour sa fête, détient un secret et il ne craint pas de le lui faire savoir ! Savoir « garder » un secret prouve la capacité d’un individu à être seul psychiquement, à ne pas éprouver l’obligation d’être, aux yeux de l’autre, totalement transparent ou à découvert.
G. Ausloos défini le secret comme étant un élément d’information que l’on s’efforce volontairement et consciemment de cacher.
Ce type de secrets peut aussi être utilisé comme forme de chantage sur l’autre. Très jeunes, les enfants ont déjà conscience du pouvoir que donne la détention d’un secret et sans ambages usent du « Je te le dirai si tu me … ». Posséder un secret permet de maintenir une forme d’emprise sur l’autre obligeant celui–ci à être bien gentil avec le détenteur du secret s’il souhaite « être dans le secret » !
Ainsi par exemple, Julie dépend de sa mère pour avoir accès aux informations concernant son père qu’elle n’a jamais vu. Sa mère n’hésite pas à détenir volontairement prisonnière une partie de son histoire et en brandissant ce secret elle excite l’intérêt de l’enfant à son égard et la maintien ainsi dans son pouvoir… Ici la valeur du secret, pour celui qui détient le secret, réside bien plus dans la possession de celui-ci que dans son contenu !
Le secret caché
De nombreux travaux portent sur les effets des non-dits familiaux concernant des évènements ressentis par un parent comme trop honteux ou trop douloureux pour pouvoir être évoqués par lui. Ce secret aboutit souvent, par l’intermédiaire de comportements « énigmatiques » des parents, à un déni de ce passé. Cependant, il n’est pas rare de voir un enfant porteur malgré lui de la psyché familiale, manifester des symptômes liés à ce secret qui se transmet à l’insu de tous, d’une génération à l’autre, au travers des échanges corporels et langagiers.
Ainsi le petit Mathieu, 4 ans, adopte des comportements d’une violence extrême et tyrannise ses parents d’une façon insoutenable. Le diagnostic de psychose est posé et les parents sont atterrés. Une autre approche permis de comprendre que ce que l’enfant attaquait et ce qu’il blessait était à comprendre dans l’histoire qui l’avait précédé. Une remontée dans le temps permis aux mémoires parentales de faire remonter à la surface le souvenir d’actes de violence sexuelle subit par chacun d’eux Sur ce fils, garçon premier-né, se focalisa, en l’aliénant à une violence aussi destructrice pour lui qu’elle était tortionnaire à l’égard de ses parents, le poids de ces souffrances.
Un parent porteur d'un secret en souffre et il n’est pas rare de voir un ou plusieurs de ses enfants de s'interroger au sujet de cette souffrance.. Dans le pire des cas cette interrogation devient le centre de sa propre histoire ; le secret aliène alors l'ensemble des choix que l'enfant peut avoir à faire. Heureusement dans la plupart des cas, le secret n'influence que certains domaines de la vie psychique.
Le poids d’un secret gardé
Anne souffre aujourd’hui d’une maladie grave qui handicape sérieusement sa marche. Cherchant ce qui pourrait être la cause de cette étrange maladie, lui revient en mémoire des temps très difficiles de son enfance. Sa mère n’étant pas heureuse en ménage avait confié à sa fille sa liaison secrète avec un autre homme. Bien sûr rien ne devait transpirer de ce secret car le père était un homme violent et de toute façon peu enclin à écouter et comprendre les attentes de son épouse. Faite complice du secret maternel, Anne s’est efforcée de prendre la place de sa mère en donnant au père l’illusion qu’il avait encore « une femme » à la maison. Fidèle à son projet, elle a accepté des attouchements incestueux. Ainsi, pendant de longues années de souffrances morales elle a protégé sa mère non seulement en ne trahissant jamais le secret qui lui fut confié mais en agissant de sorte que jamais celui-ci n’ai à être dévoilé…
Cette dame parce qu’elle « a été mise dans le secret » de sa mère, « a tenu à garder le secret » et de ce fait « a-t-elle mis au secret son propre désir », sa confiance en elle, cette belle assurance qui nous permet d’avoir des jambes solides pour avancer dans la vie, a été gravement entravée…
Lorsqu’un enfant se sent déchiré entre, d'un côté l'idéal de silence et de la loyauté au mensonge parental et de l'autre l'idéal social qui condamne les actes commis par ceux-ci, il se retrouve littéralement coupé en deux et il y a bien des chances que tôt ou tard il paye la note du secret….
Parfois il faut savoir garder un secret
Un secret est lourd à porter, aussi la façon la plus aisée de s’en alléger est de ne pas le garder ! Dans certains cas, il faut protéger le psychisme d’un enfant de la connaissance d’évènements traumatiques qui seraient désorganisateurs pour son fonctionnement psychique. Il ne faut pas qu’un individu reste prisonnier d’images du passé fascinantes par leur aspect monstrueux. Comment faire si l’histoire familiale dont il est issu risque d’introduire des sentiments massifs de terreur, d’impuissance, de rage ou de honte.
Un secret peut se neutraliser. A savoir transformer un secret monstrueux en du « pensable ». Ainsi les parents de Nicolas, adopté très jeune, ne savaient comment dire à leur enfant qu’il avait été trouvé dans une poubelle. A première vue cela paraît terrible à dire. Le récit devient une histoire d’amour en imaginant que cette jeune fille accouchant dans une ruelle sombre, au mois de février, ne voit comme seule issue, pour donner une chance de survie à son enfant, que de l’emballer dans un morceau de plastic qui traînait là et de le déposer dans une poubelle vide qu’une ménagère rentrera dans sa maison et trouvera ainsi l’enfant…
Un secret peut se temporaliser. Un fait traumatique n’a pas le même effet sur un enfant très jeune, de 10 ans ou adolescent. Certains évènements ne seront bons à connaître qu’à l’âge adulte quand cette personne n’aura plus d’enfant en bas âge.
Faut-il à tout prix dévoiler tous les secrets ?
De nos jours, il est incontestable que l’évocation d’un secret par les parents, en présence ou non de leur enfant ou la reconstruction hypothétique de ce secret, peut avoir des effets thérapeutiques importants et brise la transmission. Il faut cependant prendre garde à l’idéologie du « tout dire », et même du « tout dire tôt », dès que l’enfant peut comprendre, tout au moins au niveau des mots qui lui sont dits.
Ne perdons cependant pas de vue que : primo, la manière dont l’histoire a eu un impact sur les personnes qui s’occupaient de l’enfant petit a souvent plus d’importance que le secret lui-même.
Secondo, connaître trop jeune un secret perturbe les différents scénarios créatifs au travers desquels tout un chacun imagine ses origines.
Tercio, tous les traumatismes ne sont pas bons à penser, tous ne sont pas intégrables, symbolisables par un enfant. Par exemple, annoncer à un enfant qu’il est le fruit d’un inceste, acte qui annihile la différence des générations, peut avoir un réel effet désorganisant pour son psychisme.
Peut-être que la piste que nous devons suivre pour éviter l'écueil des secrets sera celle qui nous fait penser que toute situation douloureuse ne doit pas être vécue comme « fatale ». Pouvoir parler avec nos enfant de leurs origines, des nôtres mais aussi des choses qui nous préoccupent et nous inquiètent sans pour autant devoir donner tous les détails. L’important ne serait-il pas qu’aucun membre de notre entourage ait à penser un jour qu’on lui a caché quelque chose de crucial pour la compréhension de sa propre vie.
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