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La violence de la non-transmission

La violence augmente et la société semble la stimuler sans le savoir… Diane Drory et Vanessa Greindl vous proposent une réflexion étalée sur plusieurs semaines autour du phénomène de ce monde en manque de transmission.

Cela ne l’intéresse quand même pas !

Devenir adulte n’est pas un jeu d’enfant ! Ce travail fait au gré des liens qui, tout au long de l’enfance et de l’adolescence, se sont noués entre l’enfant et les adultes qui l’auront accompagné. Liens qui permettent de transmettre, d’expliciter d’où s’origine l’enfant.

La transmission est mise à mal !

Globalement, la société évolue vers des familles dont les valeurs essentielles de réussite sont l’épanouissement personnel et affectif et non plus la transmission. Depuis mai 68, les anciennes références sont rejetées, depuis les années 80 le temps manque pour être ensemble ! Aujourd’hui, notre société manque cruellement de transmission. Attitude pourtant utile pour enseigner à notre descendance la condition humaine.

Par ailleurs, notre culture de jeunisme ne favorise pas cette attitude de transmission pourtant essentielle ! Transmettre ça fait vieux, ringard, d’une autre époque…! A-t-on oublié, comme le soulignait Jean-Paul Sartre que « L’existence précède la naissance. » ? Que nous nous construisons au travers des représentations de l’histoire humaine, la nôtre et celle qui nous a précédée ? Que mettre un enfant au monde c’est aussi se rattacher aux générations précédentes. L’enfant devient un individu culturel par les questions qu’il pose sur les différences et … les réponses qu’il y reçoit. Si on ne pose pas les jalons de la transmission,  violence est faite à l’enfance de l’enfant !

Devenir parent, c’est entrer dans le rôle du « mandat transgénérationnel » comme dit Lebovici. C’est à dire transmettre les mythes, secrets, prénoms, valeurs familiales, etc. Transmettre c’est parler et donner les clés et les réponses nécessaires à la vie psychologique des enfants. 

L’ancrage qu’offre la transmission stabilise et enracine l’humain au fond de lui-même. Le manque de sentiment de filiation fragilise la capacité à prendre sa place  et voue les individus à l’égarement ou à l’errance…

La transmission de l’appartenance: enjeu de l’adolescence

En matière de transmission, la question du lien est cruciale. La famille privilégie la constitution du lien, mais à condition de prendre le temps de transmettre et d’ainsi partager des valeurs. Si les liens familiaux sont poreux, la transmission est floue. L’enfant se voit alors contraint à n’être que « questions », contraint à devoir s’autoriser de lui-même les réponses sur la Vie, sur sa vie…

Quelle en sera la conséquence à l’adolescence ? Ce passage de vie où l’on remet en question les valeurs acquises ; moment où le jeune doit rompre les liens tout en gardant la capacité de se lier. Temps où est remis à l’épreuve ce qui nous tient et ce qui nous relie aux autres. Croyez-moi, la non transmission d’histoire et de valeurs ne les laisse pas indifférents. Sans cette communication lors de l’enfance, l’embarras de l’adolescence est redoublé !

Lorsque manque la transmission d’une génération à l’autre, l’adolescence devient un temps d’horreur. Au lieu d’être un temps de distanciation, de questionnement de la différence, l’adolescence devient une plongée dans l’errance…Puisque le jeune se voit obligé de se délier de lui-même, son système de valeur venant de lui et non d’une transmission parentale... Plongée dans la violence de l’errance durant laquelle il se trouve alors livré à l’angoisse et à la douleur du risque d’inexistence. Une des raisons des nombreux suicides de jeunes ? 

Nous vivons dans une société immature qui produit des parents immatures qui ne protègent pas les rêves des enfants et des adolescents. Les parents sont souvent eux-mêmes des ado attardés qui ont peur de vieillir, de laisser la place, qui veulent rester dans le coup à tout prix.  Pour les jeunes fini le rêve de « Quand je serai adulte…alors je vais changer les choses…! » Pourquoi rêver de devenir adulte puisque, avec l’appui de la publicité, les adultes prennent pour idéal de rester jeune à tout prix ? Dans ce cas où chercher un modèle identificatoire?

D’où viennent les modèles…

Pour grandir, l’enfant imite mais qui imite-t-il de nos jours ? Les éducateurs ne sont plus des modèles identificatoires… et de ce fait qui deviennent les premiers éducateurs des jeunes d’aujourd’hui ? Les stars, ceux dont la réussite matérielle est fulgurante. Et les images offertes par la publicité, les médias ! Elles s’impriment dans des cerveaux vierges, images travestissant la réalité, proposant un monde de mensonges car ce monde du virtuel ne montre jamais les tâtonnements, les erreurs, les échecs, la recherche, la prise de risque, et le temps qu’il faut pour construire des liens ou un projet. 

Tout jeune est à la recherche de son identité. Pour cela il doit prendre distance de sa famille et il va être tenté d’intégrer un groupe porteur d’une identité forte. Il s’y sentira reconnu, rassuré…

N’empêche, malgré un système de codes et de références composites qu’affiche notre culture actuelle, les enfants continuent à attendre de la part des parents, des réponses. Si nous ne transmettons rien, alors les enfants souffrent car il n’y a plus d’enfance. En manque de modèles, ils ne sont plus des êtres qui se développent mais plutôt des êtres qui se questionnent.

En « transmettant »,  la mère d’Angèle lui a rendu un fier service. Angèle n’a que 13 ans et déjà quatre petits amis à son actif ! Inquiète pour sa fille, sa mère prit un jour du temps pour lui parler d’amour, de sexualité, de désir. Lorsqu’elle lui raconta n’avoir embrassé un garçon pour la première fois qu’à 17 ans, la jeune adolescente ouvrit des yeux ronds et, toute soulagée, s’écria :  « Ah, mais alors je peux me calmer ! » Comme tant d’autres filles de son âge, Angèle pensait qu’il fallait offrir son corps aux garçons sinon on était pas normale…A notre époque, beaucoup de jeunes ne se comportent sexuellement absolument pas en fonction de leur évolution psychologique. On ne leur parle que de sexe ! Les jeunes peuvent-ils encore croire à l’amour ? Influencé par les médias, ils s’identifient à leur star préférée et rivalisent avec leurs copains ou copines, sans comprendre l’enjeu sexuel de leur attitude. Ils ne rencontrent que trop peu d’adultes qui cherchent à transmettre, ils n’ont comme interlocuteurs que le net et les multimédias. Plus personne ne leur apprend à comparer, tout devient égal ou équivalent. L’adulte ne se positionne plus. Tout est acceptable. La différence entre générations est gommée.

Déni des générations.

L’adulte rentrant en compétition avec les jeunes, se veut pareil à eux. Refusant de leur laisser la place, ils rechigne à prendre celle de l’âge de la Sagesse, celle de l’Ancien qui peut enrichir de par sa différence. La différence s’interdit. Il faut être d’accord avec tout, tout accepter. Eh oui, la contestation fait peur, on ne peut plus comparer, il faut de l’égal à tout prix, de l’équivalent. La transmission est bannie au nom de l’information immédiate, au nom de la consommation fast food des aliments comme des idées. 

Vouloir se situer à égalité psychique avec nos enfants empêche le positionnement de la différence entre les générations. Isabelle l’a bien compris et voilà ce qu’elle répond à sa fille de 13 ans qui lui reproche de s’habiller « trop classique ». « Moi, j’ai envie que tu aies une mère qui ressemble à une mère ! Tu ne voudrais pas que j’aille faire mon cinéma avec tes copains. Non ! Que je m’habille comme toi, pour rivaliser avec tes copines ?Non ! Je ne veux pas prendre chez toi, ce que je n’ai plus… »  Bravo !

Mais les avancées technologiques ne facilitent pas cette position. Car voilà l’enfant, de nos jours, promu à guider nos errances d’adultes déboussolés par la rapidité des développements de notre société. Autrefois, c’était les anciens qui apprenaient à l’enfant à vivre en société, société réglée par des structures et des valeurs reconnues de tous. Ce temps est révolu, les « vieux » comptent sur le dynamisme et la créativité des jeunes. Le savoir ne descend plus des générations passées aux générations à venir, c’est le contraire. Par exemple, c’est l’enfant qui sauve l’adulte perdu dans les dédales du software ! 

N’empêche, quelque soit le monde, pour les questions de fond – la vie, l’amour, la peur, la joie, la souffrance – l’adulte digne de ce nom, devra continuer à transmettre. Son histoire ; son éthique.

Du devoir de transmettre

Les enfants, les jeunes ont besoin de « repères » concernant leur origine. Nous sommes tous héritiers d’une histoire et nous avons tous quelque chose à transmettre à la nouvelle génération : le savoir-être et le savoir-vivre. Mais pas avec des « de mon temps » mais dans l’exemple du quotidien. Il ne s’agit pas ici d’enseignement dans le sens sec du terme, mais de transmission. La transmission est quelque chose qui passe par la répétition des gestes et par l’exemple au travers des faits quotidiens. Le savoir vivre et le savoir-être ne sont pas des théories, ils ne se décrètent pas, ils se suscitent.

Face à la génération qui monte, nous devons oser assumer une place d’adulte, s’acceptant en tant que tel et proposant des idées, en fonction de notre histoire et de nos valeurs. Chaque parent est le « médiateur placenta » de son enfant, comme le dit Patrice Huerre, et cela jusqu’à l’avènement de l’état d’adulte. Ne faut-il pas être attentifs de ne pas abandonner ce rôle afin d’aider nos enfants à affronter l’avenir ? De continuer à transmettre notre amour, notre affection et nos expériences de vie, quitte à ce que cela fasse un peu vieux jeu ?… 

Mots clés: Adolescence Transmission Identification Violence Génération