Pour chaque enfant un amour différent
Quitte à avoir déçu certains parents nous avons fait, la semaine dernière, le constat qu’aimer nos enfants de façon également pareille est impossible !
« Est-ce que j’aime autant tous mes enfants ? Est-ce que je les aime « pareil » ? Pour certains parents cette interrogation est un poids encombrant car sans doute ne veulent-ils pas répéter ce qu’ils ont vécu dans leur enfance. Sans doute ont-ils grandi dans une ambiance où comparaisons et préférences ostensibles étaient de mise.
Il est important d’aimer nos enfants différemment.
Etre mis à une place particulière, qui tient compte de l’âge, du sexe et de la personnalité de l’enfant et savoir que c’est pour cette singularité que l’on est aimé est un facteur fondamental d’individuation. En effet, la différence structure et permet de se sentir unique et de prendre conscience de sa valeur.
« J’ai tellement peur qu’un enfant se sente moins aimé qu’un autre ! Nous faisons vraiment attention de ne faire aucune discrimination, de les traiter de manière identique. Quand l’un a son anniversaire nous donnons un petit cadeau à l’autre pour qu’il ne se sente pas exclu. Je fais attention de couper la tarte en morceaux égaux, de les coucher à la même heure, etc. Rien n’est plus douloureux que d’entendre un enfant nous dire « C’est injuste, tu préfères ma sœur ! » ;
Et pourtant, il est important de bannir les angoisses « d’égalité » qui nous efforcent de remplir chaque verre d’eau de façon égale, de donner un cadeau à l’un parce que l’on en a donné à l’autre, de ne pas oser prendre un moment d’intimité avec un enfant parce que « que vont penser les autres ». Chaque enfant à un moment de sa vie fait appel à plus ou moins de sollicitude ou à une attention différente. Avec l’un on fera des courses car cela l’amuse tandis qu’un autre préférera un jeu d’échec. C’est à cela qu’il faut être attentif, aux intérêts et besoins spécifiques de l’enfant vit d’unique, à ce qu’à certains moments il nécessite une attention particulière, à ce que nous pouvons lui apporter d’unique afin de l’aider à réussir sa vie. C’est cela aimer !
Gare à l’usage courant du « Mes enfants » appellation générique où tout le monde est mis dans le même sac, qui oublie que chacun est différent ! Traiter « les enfants » comme un ensemble indissoluble est une catégorisation qui fait plus leur malheur que leur bonheur car cela coupe le route de l’individuation.
Il arrive qu’un enfant nous attire ou nous agace plus qu’un autre.
S’il est normal qu’un enfant soit aimé différemment d’un autre, il est utile de s’interroger lorsqu’une attirance ou un agacement hors norme lie le parent à l’enfant. Quand on est pas seulement ému par un enfant mais fasciné par lui. Ou quand l’attachement a réellement du mal à se mettre en place.
Pourquoi se questionner ? Parce que un attachement trop exclusif à un enfant peut porter préjudice aux autres membres de la fratrie qui alors ont l’impression d’être moins aimés. Dans ce cas, l’enfant n’est pas aimé pour lui-même mais pour ce que le parent retrouve en lui : un lien ancien, une part de lui-même, une image rêvée de ce qu’il aurait voulu être. L’amour « narcissique » n’aide pas l’enfant à grandir.
Un autre enfant peut susciter chez l’adulte des réactions négatives si son comportement rappelle, de façon inconsciente, de faits ou gestes qui ont fait souffrir le parent lors sa propre enfance. Alors le manque de tolérance le fragilise dans son image de lui-même.
Dans un cas comme dans l’autre l’enfant risque de se conformer à l’image qu’il lit dans le regard parental. Il risque de s’aliéner à ce rôle, ce qui l’empêche de se construire par rapport à son propre désir.
Assurément il y a des enfants avec qui l’on a plus de complicité, dont la sensibilité nous touche plus, avec qui l’on a plus de patience et d’autres de qui on se sent plus distant, moins en phase. Il n’y a pas à culpabiliser, les relations entre deux humains ne sont jamais pareilles l’une à l’autre. L’important est de savoir reconnaître pour chaque enfant un amour différent et de faire de la place à cet amour.
L’amour dont un enfant a besoin ne devrait pas être défini par sa quantité mais par sa qualité. Car c’est dans la qualité que les liens se différentient. « J’aime Renaud pour sa jovialité, Serge pour sa ténacité, Bernard pour son courage et son inventivité, Ariane pour sa vivacité d’esprit » Ces différences loin d’être préjudiciables aux enfants, leur permettent d’élaborer des liens spécifiques, d’être reconnus dans l’évidence qu’ils ne sont pas interchangeables. L’un n’est pas l’autre, l’autre n’est pas l’un. Il n’y a pas un magma qui s’appelle « les enfants »…tous identiques parce qu’issus des mêmes parents !
Mots clés: Amour Angoisse Parentalité Attachement