Une petite fille modèle
Diane Drory
Sophie fut une enfant modèle, elle nous en explique le mode de fabrication
" Je me souviens, petite fille, j'avais plein d'idées. J'adorais dessiner des mondes qui n'existent pas : des maisons bigarrées en forme de fruit, des arbres bleus avec des jambes, des extra-terrestres mauves avec des oreilles pointues....Cela déplaisait profondément à Maman, elle me lançait de cinglants " Ces fantaisies absurdes d'enfant pas raisonnable, c'est vraiment laid ". Alors, pour lui plaire, je me suis efforcée de dessiner de belles maisons carrées, aux lignes droites tracées avec la latte, en prenant bien garde de gommer tout ce qui dépassait. Mes parents étaient émerveillés devant ces dessins " clean " et débarrassés de toute étrangeté. Mes idées, je n'en parlais plus, c'était trop fou pour mes parents. Peu à peu, je les ai oubliées."
A l'entrée en primaires face à ses camarades, le naturel de Sophie eut encore bien des élans de spontanéité. La fillette n'avait pas peur de s'acharner sur une idée, d'affronter une dispute, de riposter à un coup.
A nouveau, ses parents n'entendaient pas de cette façon l'attitude d'une gentille petite fille. C'est pourquoi souvent ils lui répétèrent : ' Tu dois toujours sourire. Il ne faut pas taper ni crier, tu dois te laisser faire. A la fin ils ne t'embêteront plus, et tu seras tranquille. Ainsi on se fait apprécier par tout le monde. C'est pratique." Sophie brida son tempérament fantasque. S'efforçant d'être toujours première de classe, elle se fit apprécier par les adultes. Les enfants, par contre, l'évitaient : elle était, à leurs yeux, trop " manche à balle ".
Ainsi, en grandissant, Sophie en est arrivée, pour être gentille et appréciée, à toujours penser ce que les autres pensent, à aimer ce qu'ils aiment, à répéter ce qu'ils ont envie d'entendre. Puis vint le jour où, face à son enfant, elle réalisa qu'elle ressentait comme un énorme vide au fond du coeur. Elle devait éduquer cet enfant mais n'avait plus d'idées à elle !
" C'est comme si je ne me souvenais pas de qui je suis. A force de passer de rôle en rôle, je me suis emmêlé les pinceaux. Il n'y a plus d'image de qui est " moi "...Je suis devenue Personne . "
Sophie fut une enfant modèle, elle nous en explique le mode de fabrication
" Je me souviens, petite fille, j'avais plein d'idées. J'adorais dessiner des mondes qui n'existent pas : des maisons bigarrées en forme de fruit, des arbres bleus avec des jambes, des extra-terrestres mauves avec des oreilles pointues....Cela déplaisait profondément à Maman, elle me lançait de cinglants " Ces fantaisies absurdes d'enfant pas raisonnable, c'est vraiment laid ". Alors, pour lui plaire, je me suis efforcée de dessiner de belles maisons carrées, aux lignes droites tracées avec la latte, en prenant bien garde de gommer tout ce qui dépassait. Mes parents étaient émerveillés devant ces dessins " clean " et débarrassés de toute étrangeté. Mes idées, je n'en parlais plus, c'était trop fou pour mes parents. Peu à peu, je les ai oubliées."
A l'entrée en primaires face à ses camarades, le naturel de Sophie eut encore bien des élans de spontanéité. La fillette n'avait pas peur de s'acharner sur une idée, d'affronter une dispute, de riposter à un coup.
A nouveau, ses parents n'entendaient pas de cette façon l'attitude d'une gentille petite fille. C'est pourquoi souvent ils lui répétèrent : ' Tu dois toujours sourire. Il ne faut pas taper ni crier, tu dois te laisser faire. A la fin ils ne t'embêteront plus, et tu seras tranquille. Ainsi on se fait apprécier par tout le monde. C'est pratique." Sophie brida son tempérament fantasque. S'efforçant d'être toujours première de classe, elle se fit apprécier par les adultes. Les enfants, par contre, l'évitaient : elle était, à leurs yeux, trop " manche à balle ".
Ainsi, en grandissant, Sophie en est arrivée, pour être gentille et appréciée, à toujours penser ce que les autres pensent, à aimer ce qu'ils aiment, à répéter ce qu'ils ont envie d'entendre. Puis vint le jour où, face à son enfant, elle réalisa qu'elle ressentait comme un énorme vide au fond du coeur. Elle devait éduquer cet enfant mais n'avait plus d'idées à elle !
" C'est comme si je ne me souvenais pas de qui je suis. A force de passer de rôle en rôle, je me suis emmêlé les pinceaux. Il n'y a plus d'image de qui est " moi "...Je suis devenue Personne . "